La stimulation transcrânienne à courant direct, une piste pour traiter l’épilepsie partielle continue
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L’épilepsie partielle continue est une forme rare d’épilepsie caractérisée par des mouvements musculaires involontaires et prolongés dans une partie spécifique du corps, souvent résistante aux traitements médicamenteux. Les crises épileptiques dans l’EPC prennent naissance dans le cortex moteur primaire. La chirurgie étant contre indiquée pour des raisons fonctionnelles, des alternatives comme la stimulation transcranienne à courant direct (tDCS), une technique non invasive modifiant l’activité cérébrale, offrent des perspectives intéressantes. Une étude récente menée par le centre de référence coordonnateur des épilepsies rares de l’AP-HM a montré que des protocoles personnalisés de tDCS pouvaient en effet réduire significativement les crises chez des patients atteints d’EPC résistante, tout en étant bien tolérés.
L’épilepsie partielle continue (EPC) est souvent associée à une altération fonctionnelle importante et a un impact majeur sur la qualité de vie des individus affectés. Le traitement de cette pathologie est pourtant souvent assez difficile avec, dans la plupart des cas, une résistance aux traitements médicamenteux.
La stimulation transcranienne à courant direct ou tDCS est une méthode non invasive qui permet de stimuler le cerveau à l'aide d'électrodes placées sur le cuir chevelu entre lesquelles un courant électrique de faible intensité (< 2mA) circule pour changer l'activité cérébrale. Plusieurs études cliniques ont rapporté des résultats prometteurs de ce traitement pour divers syndromes épileptiques en réduisant la fréquence des crises.
Très peu de projets ont cependant exploré l'impact de la tDCS sur l'EPC et leurs résultats sont incomplets et contradictoires. Dans une étude récente, l’équipe du centre de référence coordonnateur des épilepsies rares de l’AP-HM (CRéER) coordonnée par le Professeur Fabrice BARTOLOMEI en collaboration avec l’université d’Aix Marseille, l’université de Rennes et l’entreprise espagnole Neuroelectrics, présente les résultats prometteurs de l’effet de la tDCS sur des patients atteints d’EPC.


Mme Maeva DAOUD et le Professeur Fabrice Bartolomei, responsable du centre de référence coordonnateur des épilepsies rares de l’AP-HM, ont participé à ce projet.
Des protocoles tDCS personnalisés pour trois patients
De 2019 à 2023, trois patients atteints d’épilepsie pharmaco-résistante associée à une EPC ont été admis et ont suivi un protocole de tDCS au sein du centre CréER. Sur une période allant de 6 à 22 mois, les patients ont reçu tous les deux mois un cycle de cinq jours consécutifs de stimulation à 2 mA pendant 2 × 20 minutes, ciblant la zone épileptogène (EZ). Des montages personnalisés ont été déterminés pour chaque patient en prenant en compte des facteurs médicaux individuels et en utilisant des algorithmes pour optimiser la position des électrodes.
Tout au long de l’étude, des données sur les crises ont été recueillies, à partir de deux mois avant le premier cycle de tDCS, puis régulièrement chaque mois. Une évaluation clinique a également été réalisée tous les deux mois. Le critère d’évaluation principale de l’étude était les changements de la fréquence des crises.
Une diminution conséquente du nombre de crises chez les 3 patients
Les auteurs de l’étude ont analysé les données des 3 patients inclus dans l’étude :
Le Patient 1 était un homme de 26 ans diagnostiqué avec une encéphalite de Rasmussen à l'âge de 7 ans. Il présentait des crises motrices fréquentes et des épisodes de status epilepticus nécessitant une prise en charge en soins intensifs. Après la tDCS, la fréquence des crises a diminué de 92 %, et aucun status epilepticus n’a été observé après le deuxième cycle. L’EPC du membre supérieur droit est restée inchangée.
Le Patient 2 était une jeune fille dont l’épilepsie pharmacorésistante avait débuté à l'âge de 5 ans. Malgré une chirurgie partielle, elle souffrait de crises motrices sévères et résistantes aux traitements. La tDCS a entraîné une réduction progressive des crises jusqu’à 88 %, avec seulement une à deux crises par mois. L’EPC du pied droit a toutefois persisté.
Le Patient 3 était une jeune fille de 13 ans avec une épilepsie pharmacorésistante affectant le cortex moteur gauche depuis l’âge de 10 ans. Elle Présentait une EPC du pied droit et des crises motrices focales quotidiennes, évoluant parfois en crises bilatérales. Après trois cycles de tDCS, elle n’a plus eu de crises motrices, bien que l’EPC du pied ait persisté, compliquant la marche.
Des résultats encourageants qui demandent confirmation
Ainsi, chez les 3 patients, la tDCS a entraîné une réduction significative de la fréquence des crises sans effets secondaires notables, bien qu’elle ait eu un impact limité sur l’EPC elle-même. Les traitements médicamenteux sont restés stables.
Malgré des résultats prometteurs, les chercheurs restent prudents aux vues de la taille de l’étude (3 patients aux étiologies différentes), de l’absence de groupe contrôle et de l’impact inconnu des médicaments antiépileptiques. Néanmoins, ces résultats sont très encourageants
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