Efficacité et sécurité du facteur VII activé recombinant dans la thrombasthénie de Glanzmann

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En collaboration avec d’autres universités et hôpitaux, l’équipe du centre de référence des pathologies plaquettaires constitutionnelles (CRPP) de l’AP-HM a réalisé une analyse systématique de la littérature afin d’évaluer l’utilisation du facteur VII activé recombinant (rFVIIa) chez les patients atteints de la thrombasthénie de Glanzmann.

La Thrombasthénie de Glanzmann (TG) est une maladie génétique hémorragique rare caractérisée par des troubles de la coagulation sanguine dus à un dysfonctionnement des plaquettes, des cellules sanguines essentielles à la coagulation du sang et à l'arrêt des saignements. Cette anomalie affecte le complexe protéique membranaire des plaquettes, appelé « complexe GPIIbIIIa », indispensable à leur liaison avec le fibrinogène. Chez les personnes saines, le fibrinogène facilite l'agrégation des plaquettes, mais chez les patients atteints de TG, cette fixation est altérée, ce qui empêche une agrégation plaquettaire efficace.

Ainsi, dans la TG, les plaquettes n'adhèrent pas correctement entre elles, rendant difficile l'arrêt des saignements. Les manifestations hémorragiques peuvent apparaître dès la naissance et varient en intensité, allant parfois jusqu'à des formes sévères mettant en danger le pronostic vital. La transfusion de plaquettes (PLT) est le traitement standard pour prévenir ou maîtriser les hémorragies graves chez ces patients. Cependant, bien que cette méthode soit efficace, elle comporte des risques, notamment des réactions allergiques, des lésions pulmonaires aiguës liées à la transfusion (TRALI), la transmission de pathogènes et le développement d'anticorps anti‐GPIIb/IIIa ou anti‐HLA (Ab), qui peuvent entraîner une résistance aux transfusions futures. Les études montrent en effet que 25% à 50% des patients atteints de TG et qui reçoivent plusieurs transfusions plaquettaires développent des anticorps, ce qui limite considérablement les options thérapeutiques futures.

Initialement utilisé pour contrôler les épisodes hémorragiques chez les patients hémophiles, le facteur VII activé recombinant (rFVIIa) a été proposé comme alternative à la transfusion de plaquettes afin de gérer les saignements chez les patients atteints de TG. Il pourrait ainsi être envisagé comme traitement de première intention lorsqu’il n’est pas possible d’administrer rapidement des concentrés plaquettaires, ou en cas de résistance aux plaquettes. Cependant, son utilisation fait encore débat en raison de son efficacité limitée et des effets indésirables potentiels.

L'équipe du centre de référence des pathologies plaquettaires constitutionnelles (CRPP) de l'AP-HM

L'équipe du centre de référence des pathologies plaquettaires constitutionnelles (CRPP) de l'AP-HM

Une évaluation systématique de rapports de cas de la littérature

Une étude menée par le professeur Marie-Christine ALESSI et le docteur Paul SAULTIER du centre de référence des pathologies plaquettaires constitutionnelles (CRPP) de l'AP-HM a analysé les données de la littérature pour évaluer l'efficacité et la sécurité du rFVIIa, associé à des plaquettes ou des antifibrinolytiques, dans le traitement ou la prévention des saignements chirurgicaux, non chirurgicaux ou obstétricaux chez les patients atteints de TG. L'objectif était de déterminer si le rFVIIa pouvait être envisagé comme traitement de première intention. Cette étude se distingue par son approche, qui consiste à évaluer l'efficacité et la sécurité du rFVIIa uniquement à partir des données issues des rapports de cas publiés.

Les auteurs ont analysé les données de 77 rapports de cas incluant 100 sujets. Leurs résultats montrent qu’en l’absence de réfractivité des plaquettes, le rFVIIa permettait de contrôler 93 % des hémorragies non chirurgicales, 91 % des procédures chirurgicales mineures, 92 % des procédures chirurgicales majeures, ainsi que 89 % des procédures obstétricales. Chez les patients réfractaires aux plaquettes, le rFVIIa pouvait gérer 90 % des hémorragies non chirurgicales, 75 % des procédures chirurgicales mineures et 100 % des procédures chirurgicales majeures. Seuls quatre événements indésirables graves ont été associés à l’utilisation du rFVIIa, dont un chez un patient non réfractaire aux plaquettes.

Les auteurs proposent d'élargir l'utilisation du rFVIIa aux patients non réfractaires aux transfusions

En Europe, l'utilisation du rFVIIa dans la TG est actuellement restreinte au traitement des épisodes hémorragiques et à la prévention des saignements chez les patients ayant des antécédents de réfractarité aux transfusions plaquettaires ou lorsque les plaquettes sont difficiles à obtenir.

Cette étude montre que le rFVIIa est efficace et sûre chez les patients atteints de TG sans résistance aux plaquettes dans divers contextes cliniques, notamment traiter ou prévenir les hémorragies non chirurgicales et les procédures chirurgicales ou obstétricales. Les auteurs suggèrent donc d’étendre l'autorisation de mise sur le marché du rFVIIa aux patients atteints de TG et non réfractaires aux plaquettes. Une utilisation en première ligne pourrait ainsi prévenir la génération d'anticorps antiplaquettaires, ce qui éviterait des saignements plis complexes à traiter.

Bien que son utilisation soit actuellement restreinte aux patients réfractaires ou lorsque les plaquettes ne sont pas disponibles, nos résultats suggèrent que les indications du rFVIIa pourraient être élargies pour inclure les patients TG non réfractaires. Dans ces cas, l'administration en première ligne pourrait être envisagée pour réduire les risques liés aux transfusions plaquettaires.

Pour plus d’informations marci de suivre ce lien

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