Comprendre la Pemphigoïde des Membranes Muqueuses chez l’enfant
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Une étude française portant sur 12 cas pédiatriques de Pemphigoïde des Membranes Muqueuses apporte de nouvelles connaissances sur les symptômes cliniques, les obstacles au diagnostic et les options thérapeutiques de cette pathologie rare et peu documentée. Ce travail représente une étape significative dans l’amélioration de la compréhension de la PMM chez l’enfant.
La Pemphigoïde des Membranes Muqueuses (PMM) est une maladie auto-immune rare et chronique qui provoque la formation de plaies au niveau de la peau et surtout des muqueuses. Elle est expliquée par un décollement au sein des structures de la peau (formation de bulles) du fait du dépôt d’auto anticorps et elle laisse fréquemment des cicatrices. Cette maladie reste encore peu connue et mal comprise chez l’enfant, avec seulement 27 cas décrits dans la littérature médicale. Le diagnostic est souvent difficile à poser et nécessite parfois plusieurs prélèvements.
Une étude récente a été menée par le Groupe de Recherche de la Société Française de Dermatologie Pédiatrique présidé par le Dr Stéphanie Mallet, dermatologue à l’AP-HM, en collaboration avec le groupe Bulle de la Société Française de Dermatologie. Elle a été réalisée dans plusieurs centres spécialisés dans les maladies rares en France, notamment le centre de compétence des maladies bulleuses auto-immunes de l’AP-HM, dirigés par le Pr Marie-Aleth Richard. Les auteurs ont étudié en détail les signes cliniques, les analyses histologiques et immunologiques, ainsi que les traitements mis en place chez des enfants atteints de PMM.

Le docteur Stéphanie Mallet est dermatologue dans le Service de dermato oncologie, dermatologie générale et vénéréologie de l’AP-HM. Elle est également présidente du Groupe de Recherche de la Société Française de Dermatologie Pédiatrique qui a mené cette étude en collaboration avec le groupe Bulle de la Société Française de Dermatologie.
12 cas pédiatriques analysés
L’étude a porté sur 12 enfants (dont 11 filles), tous âgés de moins de 18 ans et diagnostiqués cliniquement comme atteints de PMM, avec confirmation par des analyses de tissus (histologie) et parfois par des examens immunologiques.
Des atteintes muqueuses principalement génitales et buccales
Chez ces enfants, la maladie touchait surtout les muqueuses génitales (7 cas, soit 59 %), avec 6 cas de vulvite érosive (inflammation de la vulve) et 1 cas de balanite (inflammation du gland). Les muqueuses buccales étaient également atteintes dans 7 cas de gingivite érosive. D’autres localisations ont été observées : un cas de conjonctivite fibrosante (yeux) et un cas de sténose bronchique (poumons).
Parmi les 12 enfants, 3 avaient plusieurs zones de muqueuses touchées (25 %), 3 présentaient également des bulles sur la peau (25 %), et 7 ne montraient pas de cicatrices visibles (59 %).
Un soutien du diagnostic par l’analyse des tissus
L’analyse des tissus (histologie) a révélé, chez tous les patients, la présence d’un décollement au sein de la peau expliquant la formation des bulles. Pour aller plus loin, les chercheurs ont utilisé une technique de microscopie appelée immunofluorescence directe (IFD), qui permet de visualiser les dépôts d’auto anticorps responsables du décollement des structures de la peau dans les tissus. L’IFD était positive dans 10 cas (83 %) : on y retrouvait des dépôts d’anticorps IgG et de complément C3 chez 6 enfants, des IgG seuls chez 1 enfant, et une combinaison d’IgG, IgA et C3 chez 3 enfants.
Des traitements souvent complexes
Côté traitement, 7 enfants ont reçu une corticothérapie locale mais cela n’a suffi que pour un seul patient. La plupart a donc nécessité un traitement systémique plus fort :
- Dapsone : 8 enfants
- Doxycycline : 5 enfants
- Rituximab : 3 enfants
- Corticothérapie générale : 3 enfants
- Immunoglobulines intraveineuses (IgIV) : 1 enfant
- Salazopyrine : 1 enfant
Au final, 5 enfants ont atteint une rémission complète, tandis que 7 présentaient une amélioration partielle. En moyenne, les enfants ont reçu 4 traitements différents, et le suivi a duré 4 ans.
Une avancée importante dans la connaissance de la PMM chez l’enfant
Il s’agit de la plus grande étude jamais réalisée sur des enfants atteints de PMM. Elle apporte des informations précieuses pour mieux comprendre cette maladie rare et potentiellement grave, et pour améliorer sa prise en charge.
Un grand merci à toute l’équipe du centre de compétence des maladies bulleuses auto-immunes de l’AP-HM, et tout particulièrement au Dr Stéphanie Mallet et au Pr Marie-Aleth Richard, pour leur engagement dans cette étude. Merci également au Dr Laure Chêne, ancienne interne et première auteur de ce travail.
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