Actualités

Mission du projet « ASSILE ASSIME » : une avancée pour la santé maternelle et néonatale

Publié le :
09/04/2025 à 15:10

Le taux de mortalité maternelle au TOGO est de 401 décès pour 100 000 naissances en 2022 (350 pour 100 000 naissances en 1990), soit 40 fois plus élevé qu’en France où il est de 10,8 décès maternels pour 100 000 naissances. Ainsi, ce sont 3 femmes qui meurent par jour en lien avec la grossesse.

Par ailleurs, le taux de mortalité infantile est de 40,8 %, dont un tiers de décès en période néonatale.

« Décéder lors d’un accouchement est un déni de droit autant qu’une violence faite aux femmes à une époque où l’immense majorité de ces décès est évitable grâce à des soins appropriés » (UNFPA 2020).

Les principales causes de décès maternels sont :

  • l’hypertension artérielle pendant la grossesse,
  • l’hémorragie et l’infection du post-partum (post-accouchement),
  • l’avortement non sécurisé.

Les principales causes de décès en période périnatale sont la prématurité et la souffrance fœtale en cours de travail, négligée par manque de moyens de surveillance.

Afin de lutter contre la mortalité maternelle et néonatale, l’OMS et l’ONU ont mis, depuis 2010, l’accent sur trois axes :

  • la planification familiale,
  • la mise en place à l’échelle nationale, dans le cadre des Soins Obstétricaux et Néonatals d’Urgence (SONU), de maternités de référence accessibles en moins de 2 heures,
  • l’amélioration des performances des personnels médicaux. C’est dans cette optique d’amélioration que se situe le projet ASSILE ASSIME, ou main dans la main pour diminuer la morbi-mortalité maternelle et néonatale.

Dans le cadre du projet, une quatrième mission médicale s’est déroulée du 23 février au 8 mars 2025 à l’hôpital régional de Sokodé, au CHU Sylvanus OLYMPIO et à la fondation FIADJOE à Lomé. Composée de gynécologues-obstétriciens, pédiatres, sages-femmes et infirmières de bloc, l’équipe a mené des actions de formation, d’autonomisation et de soins dans quatre domaines.

1. Dépistage clinique et échographique des grossesses à risques afin de les orienter précocement vers la structure adaptée de suivi et d’accouchement (formation des sages-femmes à l’échographie de dépistage et des médecins à l’échographie diagnostique).

Au Centre Hospitalier Régional de Sokodé, la mission a permis de former 3 sages-femmes sur 5 inscrites, car elles ont réalisé une formation complète avec pratique de 10 échographies en autonomie. Au total, 179 échographies ont été réalisées dans ce cadre.

Au CHU Sylvanus Olympio (CHU SO), une sage-femme en master s’est initiée à l’échographie de dépistage, et deux médecins seniors inscrits ont réalisé chacun plus de 10 échographies diagnostiques. Au total, 54 échographies ont été réalisées dans ce cadre.

2. Formation (sages-femmes et internes) à la prise en charge des accouchements difficiles par des ateliers de manœuvres obstétricales, mise à niveau à la lecture et à l’interprétation du rythme cardiaque fœtal.

Formation aux extractions instrumentales dans des structures hospitalières où le taux de césarienne est aux alentours de 50 %.

Adaptation et optimisation du protocole d’hémorragie du post-partum (principale cause de décès maternel) avec affichage en salle de naissance.

Optimisation des pratiques en salle de naissance à Sokodé et à Lomé :

Des avancées notables ont été observées, notamment une amélioration du confort des patientes et un début d’application du clampage tardif du cordon (25 % des accouchements par voie basse). Des ateliers sur les manœuvres obstétricales, sur l’analyse et l’interprétation du rythme cardiaque fœtal ont été organisés, avec un fort engagement des sages-femmes et des internes de spécialité. Toutefois, une meilleure organisation des formations est nécessaire pour optimiser la participation des soignants (car ils ne sont pas libérés de leurs contraintes professionnelles)

3. Formation à la prise en charge du nouveau-né à terme et du nouveau-né « fragile » par des gestes simples (clampage tardif du cordon pour prévenir l’anémie néonatale, peau à peau pour prévenir l’hypothermie néonatale et les détresses respiratoires, développement de la technique « kangourou », initialisation de la bubble CPAP ou stratégie de ventilation non invasive pour les nouveau-nés atteints de détresse respiratoire).

Renforcement de la formation pédiatrique et néonatale au CHU Sylvanus Olympio.

La seconde mission de formation pédiatrique et néonatale au CHU Sylvanus Olympio a permis de poursuivre les avancées amorcées en 2024. Axée sur l’amélioration des soins néonataux selon les recommandations de l’OMS et de l’ILCOR, cette mission a mis l’accent sur des pratiques essentielles : clampage tardif du cordon, méthode Kangourou et prise en charge des détresses respiratoires.

Des progrès notables ont été observés, avec une application croissante du clampage tardif et l’introduction progressive du peau à peau en césarienne. Toutefois, l’absence de personnel dédié aux nouveau-nés en salle de naissance et la reconnaissance encore insuffisante des détresses respiratoires restent des défis majeurs.

Pour y remédier, plusieurs actions concrètes ont été mises en place :

  • Formations interactives et ateliers de simulation destinés aux internes en pédiatrie.
  • Sensibilisation des équipes obstétricales et pédiatriques aux bonnes pratiques néonatales.
  • Début d’une collaboration obstétrico-pédiatrique favorisant une meilleure prise en charge des nouveau-nés.
  • Implémentation progressive du Bubble-CPAP pour le traitement des détresses respiratoires.

4. Formation et autonomisation à la chirurgie par voie vaginale des séquelles des accouchements (prolapsus, déchirures graves périnéales, fistules).

Au Centre Hospitalier Régional de Sokodé, 21 interventions chirurgicales ont été réalisées en cinq jours, avec une autonomisation progressive de deux chirurgiens locaux en chirurgie vaginale (pratique de 5 interventions en autonomie).

Au CHU Sylvanus Olympio (CHU SO), bien que le nombre d’interventions ait été réduit, la progression du Dr Agbodo depuis la dernière mission est encourageante. Il peut désormais opérer en autonomie et donc devenir à son tour formateur.

Dans les deux hôpitaux, l’infirmière de bloc a travaillé avec les équipes locales à l’amélioration de l’hygiène hospitalière et à la mise en place de protocoles écrits et affichés au sein des blocs opératoires.

À la Fondation FIADJOE, le Dr Fiadjoe nous a sollicités pour une journée de chirurgie vaginale dans de très bonnes conditions.

Perspectives et prochaines étapes :

  • Développement de missions décentralisées dans d’autres hôpitaux régionaux d’ici 2025-2027.
  • Collaboration avec le Pr Douaguibé pour structurer la formation en gynécologie-obstétrique au niveau national.
  • Proposition par notre équipe obstétricale d’un travail de thèse par un interne en gynécologie obstétrique sur le thème suivant : « Mise en place du clampage tardif du cordon et du peau à peau dans les césariennes programmées : état des lieux après 1 an de pratique au CHU Sylvanus Olympio », sous la direction du Pr Douaguibé.
  • Poursuite des actions de formation à la Fondation FIADJOE pour optimiser le recrutement chirurgical et renforcer l’autonomisation locale.
  • Amélioration de la collaboration obstétrico-pédiatrique avec la participation d’un pédiatre aux staffs obstétricaux.
  • Mise en place d’une fiche de transmission obstétrico-pédiatrique simplifiée pour améliorer le délai de transfert des nouveau-nés vers le service de réanimation pédiatrique.
  • Participation au congrès de la Société de Pédiatrie Togolaise en avril 2025 pour partager les avancées sur l’implémentation du Bubble-CPAP.

Prochaine mission : novembre 2025

Cette prochaine mission visera à consolider les acquis et à approfondir les formations, avec l’ambition de renforcer durablement la qualité des soins maternels et néonataux au Togo.

Cliquez sur une image pour l'agrandir