Un traitement pour retrouver sa voix

Cellcordes : Les équipes de l’AP-HM ont mené la première étude mondiale d’injection chez l’homme de cellules souches autologues dans des cordes vocales cicatricielles.
 

La voix : un élément constitutif de notre identité, de notre personnalité. Un moyen d’expression unique, personnel, intime, qui permet en même temps de se relier aux autres, de communiquer. Pour certains, les cordes vocales sont de véritables instruments de musique, leurs vibrations sont capables de captiver, de toucher tout un public.

Lorsque la voix est altérée, cela a des répercussions sur la vie toute entière. Le simple fait de prononcer quelques mots peut se transformer en épreuve, générer un sentiment de honte. Le Laboratoire de culture et thérapie cellulaire dirigé par le Pr Florence SABATIER, en collaboration avec le Pr Antoine GIOVANNI des services d’ORL - chirurgie cervico-faciale (Pr Justin MICHEL) et Chirurgie plastique (Pr Dominique CASANOVA), a élaboré un traitement novateur pour redonner leur voix aux patients.



Les lésions cicatricielles des cordes vocales résultent souvent d’un traumatisme chirurgical (opération d’un nodule ou d’un polype), plus rarement d’une altération congénitale ayant évolué. Ces lésions se caractérisent à la fois par une perte de substance et une fibrose. La corde vocale atteinte se rigidifie et ne vibre plus normalement, provoquant une dysphonie (voix soufflée, éraillée, trop aigue et instable). Les patients se retrouvent bien souvent dans une impasse thérapeutique car les traitements existants ne permettent pas de véritablement redonner aux cordes vocales leur souplesse naturelle.

Les équipes ont eu l’idée de recourir à la thérapie cellulaire et aux cellules souches. Elles ont ainsi mené la première étude mondiale d’injection chez l’homme de cellules souches d’origine adipeuse dans des cordes vocales cicatricielles. 
 

Appelé Fraction Vasculaire Stromale du tissu adipeux, le produit cellulaire sélectionné avait notamment déjà été testé par le Pr Jean Charles GRIMAUX et son équipe dans le traitement des fistules de la maladie de Crohn (Adicrohn). Ses propriétés anti-inflammatoires, angiogéniques, régénératrices, immunomodulatrices et antifibrotiques étaient connues de l’équipe du Laboratoire de culture et thérapie cellulaire, habituée à produire dans des conditions optimales ce type de médicament biologique.
 

L’essai clinique Cellcordes, financé par la Fondation des Gueules Cassées et la Fondation de l’Avenir, a permis de proposer ce traitement novateur à 8 patients souffrant de dysphonie due à des lésions cicatricielles des cordes vocales. Les patients ont été suivis pendant 12 mois, avec une amélioration majeure de la phonation pour 7 des 8 patients traités, déclarés comme significativement répondeurs. En outre, la faisabilité de l’injection et sa tolérance ont été démontrés puisqu’aucun effet secondaire majeur n’est survenu au cours de l’étude. Pour une patiente anciennement chanteuse, les résultats à un an sont stupéfiants puisque sa voix soufflée et éraillée est devenue quasiment normale. On imagine le bonheur pour cette patiente de pouvoir donner de la voix et chanter à nouveau. Cette étude a été récemment publiée dans la revue internationale JAMA ORL.

Un second essai baptisé Cellcordes 2 est d’ores et déjà en préparation. Il s’agira cette fois d’un essai de phase 2, multicentrique, concernant 36 patients.