Lé déficit en G6PD
Le déficit en G6PD (Glucose-6-Phosphate Déshydrogénase) ou favisme touche plus de 400 millions de personnes, essentiellement originaires d'Afrique, d'Asie, d’Inde, du Moyen-Orient et du Bassin Méditerranéen. La grande majorité d’entre elles est asymptomatique. Le nombre de personnes déficitaires en France est estimé à au moins 250 000.
L’enzyme G6PD est indispensable au contrôle du stress oxydatif dans le globule rouge. Elle intervient à la première étape de la voie des pentoses‐phosphates produisant du NADPH à partir de l’oxydation du glucose-6-phosphate. Le NADPH est le co-enzyme de la glutathion réductase qui permet la production du glutathion réduit, molécule indispensable pour lutter contre certaines oxydations.
Le gène codant pour la G6PD est situé sur le chromosome X et les sujets symptomatiques sont le plus souvent de sexe masculin. Les cas féminins symptomatiques sont plus rares mais bien décrits : sujets féminins homozygotes et certaines hétérozygotes également. Si les sujets féminins hétérozygotes sont le plus souvent «conductrices» sans être malades, l’inactivation aléatoire d’un des 2 chromosomes X peut préférentiellement se faire vers l’allèle déficitaire et conduire chez l’hétérozygote à un déficit franc.
Bien qu’un grand nombre de variants G6PD soit décrit, il existe souvent dans une zone géographique un variant déficitaire dominant : variant A- pour les populations issues d'Afrique, variant B- (appelé aussi variant Med) pour celles du Bassin Méditerranéen et du Moyen-Orient par exemple. Ces deux variants déficitaires sont les plus fréquemment rencontrés en France.
L’OMS a classifié les variants G6PD en 5 catégories (dont 3 sont déficitaires) selon la mesure de l’activité G6PD résiduelle. Les déficits de classe 2 (activité < 10 %) et 3 (60% à 10 % de la normale) se caractérisent par un risque d’accident hémolytique aigu secondaire à un stress oxydatif et un risque d’ictère néonatal mais n’entraînent pas d’hémolyse chronique. Le déficit en G6PD de classe 1 (niveau d'activité résiduelle souvent < 1 %) est exceptionnel, sévère et se traduit par une anémie hémolytique chronique.
Si le déficit enzymatique en G6PD est le plus souvent asymptomatique il peut entraîner une hémolyse aiguë lors de l’exposition à un médicament ou produit oxydant ou bien suite à l’ingestion de fèves (favisme), ou encore contemporaine d’un épisode infectieux. L’hémolyse survient dans les 24 heures à 3 jours suivant la prise de l’agent oxydant. De nombreux facteurs (dose du médicament, type de déficit..) interviennent dans la gravité de l’anémie. Le favisme s’accompagne de signes d’hémolyse souvent plus précoces et sévères que ceux observés après la prise de médicaments oxydants. L’anémie peut, en particulier chez l’enfant, nécessiter une transfusion de globules rouges en urgence. Les douleurs abdominales ou lombaires, l’hémoglobinurie (urines « porto » ou « coca-cola ») témoignent d’une hémolyse intravasculaire. L’hémolyse est susceptible de se compliquer d’une insuffisance rénale aiguë.
Un accident hémolytique peut survenir chez un nouveau-né ou un nourrisson déficitaires allaités, via l’exposition maternelle aux agents oxydants.
L’autre manifestation clinique du déficit en G6PD est l’ictère néonatal. Le déficit en G6PD est le plus souvent asymptomatique en période néonatale mais dans la population déficitaire l’ictère, sa principale manifestation, est plus fréquent et plus sévère. Il survient toujours dans les deux premières semaines de vie. Les garçons sont plus souvent affectés que les filles.
Le déficit en G6PD peut entraîner un ictère nucléaire et représente un tiers des étiologies des hyperbilirubinémies sévères ou des indications d’exsanguino-transfusion.
L’hémolyse n’est généralement pas déclenchée par un stress oxydatif. Néanmoins, l’interrogatoire doit toujours chercher à identifier une exposition alimentaire ou médicamenteuse en particulier via le lait maternel.
Le diagnostic de déficit en G6PD est posé sur le dosage abaissé de l'activité enzymatique. Le recours à la génétique moléculaire n’est en règle pas nécessaire.
La prise en charge des sujets déficitaires est avant tout préventive, les principales mesures étant l’éviction des fèves et des médicaments oxydants. Elles sont appliquées tout au long de l’existence, chez toute personne déficitaire en G6PD quels que soient ses antécédents et le type de mutation dont elle est atteinte ainsi que par les mères enceintes ou allaitant des nouveau-nés et nourrissons potentiellement déficitaires. En 2014, l'ANSM a publié la mise à jour du document « médicaments et déficit en G6PD » qui comporte la liste recensant les médicaments susceptibles de provoquer une hémolyse chez les patients atteints de déficit en G6PD. Cette liste fait actuellement référence et établit 3 niveaux : médicaments contre-indiqués, déconseillés et des médicaments dont la dose maximale doit être respectée.